Dans les toiles de Fabrice Harlé, tout naît de la couleur, elle structure, donne forme et vie aux figures, scènes et paysages. Sans limite, c’est elle qui prend le pouvoir et qui fait œuvre créatrice. Elle se fait chatoyante, vibrante, puissante encore lorsqu’elle s’affirme avec force pour faire surgir une silhouette, ou bien les traits d’un visage ou bien délicate, toute en nuances et transparences, pour laisser affleurer plusieurs paysages à travers un seul.
La couleur nous sert de mémoire, c’est elle qui recompose l’image pour nous. Les toiles abstraites portent elles aussi la marque du souvenir, d’un passage, de traces laissées à dessein pour nous permettre de redessiner à loisir un paysage mental. S’y trouvent souvent des indices, tout aussi bien mystérieux qu’évocateurs et laissés à dessein pour nous emmener dans un voyage, celui que l’on se choisit nous-mêmes.
Il y a une tension perpétuelle dans tous les tableaux entre une première impression forte et immédiate, prégnante, puis une autre, plus fugace, insaisissable, qui semble nous filer entre les doigts. Nous sommes face à une peinture qui demande du temps, qui s’offre puis se dérobe, comme si elle se modifiait imperceptiblement sous nos yeux.
Isabelle Fabre