A sa manière, Aubry opère un miracle comparable avec la construction de ses monochromes vivants : libre de toute observation (il ne voit pas la nature qu’il peint : on la lui raconte), il ose faire rentrer cette nature dans un cadre, restitue sa vibration avec celle d’une teinte unique née de la multiplicité des couches chromatiques superposées et celle des traces qu’il grave dans l’épaisseur de la couleur, juste avant qu’elle ne sèche tout à fait. Là aussi, un geste léger forme le premier pas – une série de dessins spontanés sous la dictée (le paysage raconté) – puis le choix d’un croquis pour en faire une toile : une savante construction de l’épaisseur picturale dans laquelle s’inscrit un geste final rapide, entre écriture et dessin, parsemant l’espace coloré de silhouettes ou vues en plan de traces signifiantes mais incertaines, prêtes à muter et s’animer.